Avril 2019 Rapport de la cour des comptes: morceaux choisis

Les personnels des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) et de la sécurité civile : des défis à relever, des perspectives à redéfinir. Sorti en mars 2019

 Beaucoup de chiffres, des remarques et de mauvais exemples mis en avant en minimisant leur côté sombre.

Morceaux choisis 

Etat des lieux : « (…) le système français de sécurité civile, dont l’équilibre repose sur la disponibilité de volontaires assurant les deux-tiers du temps d’intervention des SDIS, a désormais atteint ses limites. »P11

« Cette évolution n’est pas durablement soutenable. Son inflexion nécessite un recentrage du dispositif sur le cœur de ses attributions. Il ne pourra être mis en oeuvre qu’à l’issue d’une réflexion approfondie associant l’ensemble des parties prenantes (…) » P12 

« (…) l’État, « garant de la cohérence de la sécurité civile ».P13 

« En 2017, le budget total de fonctionnement des SDIS et du service départemental-métropolitain d’incendie et de secours (SDMIS) du Rhône atteignait 4,6 Md€. (…). Les dépenses de personnel (3,4 Md€, charges comprises) représentaient 83,7 % des charges de gestion des SDIS (4,1 Md€ hors charges financières). Elles ont progressé de 1,7 % par an en moyenne entre 2011 et 2017. L’effectif total des sapeurs-pompiers professionnels des SDIS s’élevait à 40 537 en 2018 (…) » [40 480 en 2011 soit + 0,14 %]. «Celui des volontaires est passé dans le même temps de 195 232 à 194 975 (soit une diminution de 0,13 %).» P23 dans le même temps le nombre d’interventions a augmenté de 10%

 Des exemples mis en avant :

Le Gard, « dispose de seulement 30 centres de secours, dont cinq centres de secours principaux, et aucun centre de première intervention. Ce type d’organisation se caractérise généralement par un moindre recours aux sapeurs-pompiers volontaires et génère une forte sollicitation des sapeurs-pompiers professionnels, des délais d’intervention qui peuvent s’avérer importants du fait des distances parcourues et une usure prématurée du matériel roulant. Le montant par habitant des charges de personnel du SDIS (76,48 € en 2017, la moyenne nationale des SDIS de catégorie B s’établissant à 75 €) reflète ces choix. »

La Mayenne, «Un maillage dense, (…), doté d’une cinquantaine de centres de secours n’est pas nécessairement plus optimal l’établissement de recourir largement au volontariat lui a permis de contenir ses charges de personnel, dont le montant par habitant atteignait 38,77 € en 2017, alors que la moyenne nationale des établissements de catégorie C s’est établie la même année à 77 €. Ce résultat s’explique en partie par la diminution des vacations de volontariat, qui résulte notamment de l’autorisation de départ de véhicules d’assistance aux victimes (VSAV) armés de trois agents au lieu de quatre auparavant, quitte à s’affranchir des normes réglementaires ».

«Cette organisation pragmatique permet l’échelonnement de l’envoi des secours, quitte à faire partir des véhicules sous-armés au sens réglementaire, afin d’assurer la sécurisation du site et à préparer l’action des renforts. Elle permet à l’établissement de maîtriser ses coûts. Ainsi les montants par habitant des dépenses de personnel de ces deux SDIS (respectivement 50,35 € et 41,06 €) s’établissaient en 2017 à un niveau nettement inférieur à la moyenne de leur catégorie (77 €).  La question est toutefois posée de la compatibilité de ce type de pratiques avec la réglementation en vigueur, donc de la nature du risque juridique pris par les SDIS concernés. Leur pérennisation nécessiterait un assouplissement des textes et normes en vigueur. »

Des exemples mis en avant qui interrogent, un des rapports des chambres régionales des comptes pointait pour la Mayenne un non-respect des obligations réglementaires ou d’autres faiblesses, ex : « Le SDIS n’est, en effet, pas fondé à armer des véhicules d’effectifs en nombre inférieur aux seuils réglementaires définis (…).» 53.14 ou «Le P OJ moyen constaté dans les CS et CPI est inférieur de près de 20 % aux prescriptions du règlement opérationnel et de 25 % à celui de référence de l’IDSC (…). La situation des CS apparaît particulièrement dégradée : il manque, en moyenne, l’équivalent d’une soixantaine de sapeurs-pompiers pour assurer l’effectif de permanence préconisé par l’IDSC.» 53.32, etc… et pour la Haute-Saône «(…) ce dispositif a toutefois pour conséquence le départ de certains véhicules en premier appel, non armés réglementairement.» 70.43 ou «Le but  recherché par le législateur était d’aboutir à terme à l’extinction des CPI non intégrés.» 70.15

La PFR : « La durée moyenne d’engagement, que ces dispositifs ont pour objet d’augmenter, n’a pas significativement progressé. De 10 ans et 11 mois en 2011, elle est passée à 11 ans et 8 mois en 2016. Des écarts importants peuvent être relevés. Ainsi le SDIS de la Marne enregistre une durée moyenne d’engagement des SPV de 10 ans et 2 mois. Pour le SDIS de l’Aube, le nombre moyen d’années d’engagement a augmenté de cinq ans. Il a été porté à 13,3 ans, sans toutefois qu’il soit possible d’établir un lien avec l’introduction de la PFR. La durée moyenne d’engagement des SPV du Haut-Rhin est quant à elle passée de 11,5 années en 2011 à 13 ans mais celle évolution apparaît également dépourvue de lien avec le versement de cette prestation.» P45 

Les statistiques de la DGSCGC : « Les données statistiques nationales sont produites sur la base des éléments déclaratifs fournis par les SDIS. La confrontation de ces données avec la réalité locale permet de constater certains écarts. En effet le ministère de l’intérieur fait le choix, lorsqu’un SDIS n’a pas transmis d’informations, de lui appliquer la moyenne de sa catégorie. » P46 

« La direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) estime pour sa part que la totalité des gardes assurées par les sapeurs-pompiers volontaires représente de l’ordre de 30 000 ETP. » P46

 « Leur situation financière se caractérise toutefois par une quasi absence de marge de manoeuvre. Étant dépourvus de ressources propres, les SDIS sont tributaires des contributions provenant des départements d’une part, des communes et établissements publics intercommunaux (…) », près de 96 %. P52 

Les baisses de dotations :« Quelques départements sous contrainte budgétaire ont cependant réduit leur dotation : en 2016, les départements de l’Eure et de l’Oise l’ont baissée de 7 %, soit respectivement 1,6 M€ et 2 M€, ceux du Nord et de l’Aisne de 5 % (4,6 M€ et 1 M€), le département du Gard de 4 % (1,5 M€), celui des Pyrénées-Orientales de 3 % (0,55 M€) et celui du Pas-de-Calais de 2 % (1,2 M€). » P54

 Les personnels : « Les SDIS sont confrontés à un vieillissement de leurs effectifs qui se conjugue à une faible mobilité des personnels titulaires. L’âge moyen des pompiers-professionnels était de 41 ans en 2016, contre 39 ans en 2011. En revanche, l’âge moyen des sapeurs-pompiers volontaires est de 34 ans et n’a pas évolué depuis 2011. La mobilité est généralement faible dans tous les SDIS. » P54

« Entre 2011 et 2018, le nombre d’agents administratifs est resté identique et celui des SPP a progressé modérément, de 0,1 %. » P46

 

« Même si une stabilisation est constatée depuis 2014, l’effectif des SPV, y compris non intégrés, a globalement régressé depuis 2011, en dépit des initiatives prises pour l’augmenter, comme le développement des jeunes sapeurs-pompiers ou la réalisation de campagnes de communication. » P55

« (…) de 2011 à 2016, le nombre de groupements a augmenté de 7,3 % et, parmi eux, celui des groupements fonctionnels a progressé de 9,8 %. » « Cette limitation est d’autant plus nécessaire que le nombre d’officiers servant dans ces groupements n’est plus retenu pour apprécier les taux d’encadrement fixés par le CGCT. Compte tenu de ces éléments et de la multiplication des groupements, la Cour réitère sa recommandation d’en encadrer le nombre. » P61

 « La DGSCGC a précisé à cet égard qu’en cas de transfert de compétence (qui serait réalisé à l’issue d’une concertation avec les collectivités employeurs), elle pourrait demander aux SDIS la transmission des actes concernant la gestion des officiers dans l’outil de gestion des carrières et des compétences qui sera progressivement déployé à partir de 2019. » P62

 « (…) conjuguée à la suppression du contingentement du nombre des officiers occupant des emplois de direction, la réforme, non conçue pour être mise en œuvre à coûts constants, contribuera à aggraver les dépenses de rémunération des SDIS (…).» P63

 Double-statut : « Ce cumul est particulièrement avantageux, puisque les indemnités attribuées aux sapeurs-pompiers volontaires, qui s’accompagnent d’un avantage retraite, sont exonérées de contributions sociales et d’impôt sur le revenu. Il est à noter que ni les gendarmes ni les militaires ne sont autorisés à exercer simultanément leur activité professionnelle et celle de réserviste au sein de leur unité ou de leur arme. Dans son rapport de 2011, la Cour avait recommandé de mieux encadrer le cumul de ces activités. » P63

 « Le SDIS des Alpes-Maritimes autorise ainsi la totalité de ses SPP, à l’exception du directeur, à exercer des vacations de volontariat. Dans le SDIS du Gard, 91 % des SPP sont placés sous « double statut » et aucun cadre ne définit leur service. Ainsi 62 % des professionnels exercent des activités de volontaire dans leur centre d’affectation. Dans un autre SDIS, les indemnités perçues en franchise d’impôt peuvent dépasser 25 000 € par an. Dans un autre encore, les vacations horaires de volontaires effectuées par les professionnels ont augmenté de plus de 40 % alors que celles réalisées par les seuls volontaires ont progressé de moins de 3 % entre 2011 et 2017.

Ces pratiques, éloignées de l’objectif initial d’encouragement du volontariat « aux côtés des professionnels », constituent un dévoiement de la loi et de l’effort budgétaire que la collectivité réalise au bénéfice d’une catégorie particulière d’agents publics qui utilisent ces dispositions pour bénéficier dans certains cas de substantiels compléments de rémunération en franchise d’impôt et de cotisations sociales. Elles posent également d’évidentes difficultés au regard du respect de la norme européenne encadrant le temps de travail (…). La Cour ne peut donc que renouveler sa recommandation de 2011 relative à l’encadrement du cumul de ces activités.

Le moment est venu de mettre un terme aux abus que les contrôles des chambres régionales des comptes ont mis en évidence en limitant le volume des vacations correspondantes, sans interdire le cumul dont la nécessité résulterait d’impératifs opérationnels. La solution envisagée par la DGSCGC, consistant à produire une nouvelle circulaire, est insuffisante. » P64

« De manière générale, les heures effectuées en vacation par les SPP sous double statut ne sont pas plafonnées. Des abus ont d’ailleurs été fréquemment relevés. » P72

 Le régime indemnitaire : « La prime de feu est versée dans les SDIS concernés à son taux maximum, indépendamment du nombre d’interventions réalisées au titre des incendies. Les dépenses correspondantes atteignent souvent des montants importants (…). » P68

« Quelques anomalies concernant l’indemnité de responsabilité ont été relevées. » P68

« Des SPP perçoivent parfois des indemnités de responsabilité ne correspondant pas à leurs fonctions (…)» P68

« Dans la plupart des SDIS, quasiment tous les SPP perçoivent l’indemnité de spécialité. Or il est permis de douter que tous les intéressés, même ceux exerçant une activité directement opérationnelle, fassent effectivement usage des qualifications techniques concernées. » P69

 Indemnités SPV : «  L’absence d’encadrement des indemnités des SPV est fréquente. Les SDIS n’ont généralement pas fixé de montant maximal pouvant être perçu par un SPV dans leur règlement intérieur. De ce fait, les indemnités versées peuvent se révéler importantes pour quelques SPV. Certains dépassements de taux ont pu être constatés.» P71

 « Dans les Landes, 21 % des SPV cumulaient la moitié des indemnités versées. De même, dans l’Yonne, 12 SPV ont perçu sur la période plus de 10 000 € par an. » P72

 « Il appartient à la DGSCGC de mieux encadrer le dispositif et de faciliter la diffusion des bonnes pratiques. Un plafonnement de l’exonération fiscale dans la limite d’un volume d’heures donné pourrait également être mis en oeuvre, afin de renforcer leur efficacité. La Belgique a retenu cette solution » P72

 Logements de fonction : « (…) un manque de transparence et de rigueur dans l’attribution des logements a été signalé à plusieurs reprises par les chambres régionales des comptes, dont les contrôles ont également mis en évidence de nombreuses irrégularités. Ainsi les avantages en nature correspondant aux logements ne sont pas toujours intégralement déclarés au plan fiscal et social. En outre, il est fréquent que les charges annexes au logement et notamment les fluides (chauffage, électricité, eau) soient indûment payées par les SDIS, contrairement à ce que prévoit l’article R. 2124-71 du code général de la propriété des personnes publiques, qui a mis fin depuis 2012 à la gratuité des avantages accessoires au logement. ». P74

« Dès lors que n’est plus satisfaite la condition relative à la nécessité absolue de service, qui seule justifie le bénéfice des concessions de logements à titre gratuit, le SDIS peut y mettre un terme et prescrire le paiement rétroactif de redevances. »  P75

 Les véhicules de service : « Globalement, le suivi par les SDIS de leur parc automobile se révèle insuffisant. Les règlements intérieurs n’évoquent pas, ou sont imprécis, sur les règles d’utilisation des véhicules. Les décisions d’attribution font également souvent défaut. De même, la tenue des carnets de bord est fréquemment lacunaire. » (…) « La plupart des SDIS ne procèdent à aucun contrôle de l’utilisation des véhicules de service faisant l’objet de remisage à domicile. Les possibilités d’utilisation privative sont dès lors illimitées. » P75

 « Il existe cependant un certain nombre de bonnes pratiques, telle que la mise en oeuvre d’un logiciel de suivi du carburant en Haute-Saône. » P76

Gestion : « L’administration centrale ne dispose donc pas de données suffisantes pour s’assurer de la cohérence de l’organisation des secours au niveau des SDIS. » P77

«  Les lacunes des SIRH se manifestent notamment par l’impossibilité dans laquelle se trouvent de nombreux SDIS de suivre avec précision le temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels, et plus encore de s’assurer de la complémentarité des temps de présence des SPP exerçant des fonctions de volontaires. » P77

 « En 2018, dans les SDIS de la Haute-Corse, des Hautes-Alpes, de l’Aube, de l’Yonne et de La Réunion, le suivi du temps de travail était toujours effectué manuellement, à partir de fichiers prenant la forme de tableurs parfois non harmonisés entre les différents centres de secours (Hautes-Alpes) ou sur une base déclarative (La Réunion). » P78

 Temps de travail : « De nombreux SDIS ne respectent pas la durée annuelle légale du travail. La durée théorique et effective de travail est ainsi souvent inférieure à 1 607 heures, quelle que soit la catégorie de personnel considérée. » P84

« (…) certains SDIS modifient par notes de service les délibérations du CASDIS. » P86

« Il a par ailleurs été constaté dans plusieurs SDIS l’absence de règlement intérieur à jour. Ces pratiques ne permettent pas au CASDIS de se prononcer sur l’organisation et la durée de travail des personnels. L’absence fréquente et persistante de système de suivi et de contrôle automatisé du temps de travail a également été relevée. » P86

 « Le recours aux G24 entraîne en effet de nombreuses « gardes blanches » (c’est-à-dire des gardes sans intervention), compte tenu de la mobilisation opérationnelle effective des sapeurs-pompiers, et ne permet pas l’adaptation aux écarts de fréquence et d’intensité des interventions entre les activités nocturnes et diurnes, en semaine et les samedi et dimanche. L’organisation en G24 se révèle par ailleurs très coûteuse, puisqu’elle suppose le recrutement de quatre à cinq SPP pour assurer la présence d’un seul agent de garde chaque jour. Les G24 n’ont donc d’intérêt réel que dans les centres dont l’activité opérationnelle est soutenue et régulière, eu égard aux effectifs postés. » P88 

« En Seine-et-Marne (…) La diminution du temps de travail annuel qui a fait suite à l’entrée en vigueur de ce texte correspond à une réduction de sa capacité opérationnelle de 170 postes (soit une baisse de l’effectif de garde journalier départemental de près de 40 sapeurs-pompiers). En Haute-Saône, seul le centre d’intervention principal de Vesoul a été affecté par la réforme, en passant de 100 à 94 G24 par an. Avec un effectif de 21 SPP, ce CIP aurait dû procéder à deux recrutements de professionnels. Par mesure d’économie, le SDIS a préféré recourir davantage aux SPV. » P89

 « En raison de leur ambiguïté, les dispositions réglementaires actuellement en vigueur laissent coexister plusieurs interprétations du temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels en régime dit « mixte », c’est-à-dire des  SPP qui alternent des gardes de 24 heures et des gardes d’une durée plus courte. Le temps de travail de ces SPP devrait être calculé au prorata des différentes gardes sur la base de la durée équivalente (1 128 heures semestrielles) et de la durée légale (1 607 heures). » P90

 « La DGSCGC ne porte pas le projet d’inscrire la durée quotidienne d’équivalence dans la réglementation, cette compétence relevant des conseils d’administration des SDIS. Toutefois, elle est attentive au respect des plafonds légaux de temps de travail et aux retours d’expérience des SDIS qui expérimentent le transfert des gardes de 24 heures vers les gardes de 12 heures. » P91

« Par ailleurs, les SDIS ne respectent que rarement la contrainte semestrielle introduite à l’article 3 du décret n° 2001-1382 (…) de nombreux SDIS mettent irrégulièrement en oeuvre, permet le report du surplus ou du déficit d’heures d’un semestre à l’autre, voire d’une année à l’autre.» P92

 « Les PATS et les SPP en service hors rang relèvent des dispositions générales de la fonction publique territoriale. Le temps de travail des intéressés est cependant très souvent inférieur au niveau légal de 1 607 heures, du fait notamment de l’attribution de congés supplémentaires (autorisations spéciales d’absences ou congés avant départ en retraite). Par ailleurs, certains SDIS font pour ces agents une lecture erronée de la réglementation relative au temps de travail. Enfin, la durée effective de travail peut parfois s’éloigner de la durée théorique, en l’absence de réel contrôle exercé par le SDIS. » P94

 L’activité des SPV : « Les activités de SPV sont faiblement encadrées. » P94

« Les SDIS peuvent instituer un volume minimal d’activité annuel, afin d’entretenir la capacité opérationnelle des SPV, ou au contraire chercher à limiter le nombre de leurs vacations, afin d’éviter que certains SPV n’exercent à temps plein une activité réputée bénévole mais indemnisée. » P95

 « La non-conformité à la norme européenne du temps de travail effectué

La directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 encadre le temps de travail afin de garantir la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. Le temps de travail hebdomadaire moyen, heures supplémentaires comprises, ne peut dépasser 48 heures et le temps de repos doit être de 24 heures tous les sept jours et de 11 heures par tranches de 24 heures. Des dérogations au repos journalier de 11 heures ou au travail de nuit de 8 heures sont possibles, notamment pour les services de sapeurs-pompiers ou de sécurité civile. Toutefois, elles ne peuvent pas porter sur la durée maximale de 48 heures hebdomadaires. » P99

 « Des SDIS ne respectent pas le repos réglementaire des sapeurs-pompiers professionnels (…) le SDIS de l’Eure fait valoir que ses effectifs ne lui permettent pas de respecter la limite maximale de 48 heures hebdomadaires en moyenne. » P100

 « La question se pose de savoir si les SPP « sous double statut » peuvent intervenir comme SPV durant leurs repos réglementaires. Plusieurs SDIS ne tiennent pas compte de ces repos pour la programmation des gardes des intéressés, à l’instar des Landes ou de l’Allier, ou pour l’organisation de formations, indemnisées sous forme de vacations, comme celui des Pyrénées-Atlantiques. » P101

« La fragilisation du modèle français de sécurité civile

En assimilant les sapeurs-pompiers volontaires à des travailleurs au sens du droit de l’Union et en rappelant que les États membres ne peuvent pas déroger à leur égard aux dispositions de la directive du 4 novembre 2003, l’arrêt de la CJUE du 21 février 2018 remet en question l’employabilité des SPV. Cet arrêt plafonne de fait le temps de travail total annuel des travailleurs à 2 304 heures par an et, sous réserve d’une interprétation objective des conditions d’emploi des SPV par les juridictions nationales, assimile également les périodes d’astreinte à du temps de travail. Il réduit donc de façon considérable la disponibilité pour les SDIS de ceux des SPV qui exercent à titre principal une autre activité salariée. Cet arrêt, rendu en réponse à un renvoi préjudiciel de la Cour du travail de Bruxelles (Belgique), n’est pas d’application immédiate, car il ne tranche pas le litige. Les  juridictions nationales, saisies d’un problème similaire, seront cependant tenues par cet arrêt. En France, le tribunal administratif de Strasbourg, s’était déjà prononcé en novembre 2017 dans le sens de l’applicabilité aux SPV de la directive du 4 novembre 2003. » P103

 «(…) les SDIS peinent à couvrir leurs besoins en SPV, qui sont surtout disponibles la nuit. Ainsi, dans l’Allier, 19 des 61 centres d’incendie et de secours constitués de volontaires étaient déjà en sous-effectifs en 2017. » P105

 « La possible requalification des astreintes en temps de travail

(…) Dans sa décision du 21 février 2018, la CJUE précise que « le facteur déterminant pour la qualification de « temps de travail », au sens de la directive 2003/88, est le fait que le travailleur est contraint d’être physiquement présent au lieu déterminé par l’employeur et de s’y tenir à la disposition de ce dernier pour pouvoir immédiatement fournir les prestations appropriées en cas de besoin. (…) La CJUE a considéré en l’espèce que « le temps de garde qu’un travailleur passe à domicile avec l’obligation de répondre aux appels de son employeur dans un délai de 8 minutes, restreignant très significativement les possibilités d’avoir d’autres activités, doit être considéré comme « temps de travail »  P106

 « En définitive, la contrainte forte qu’introduit la jurisprudence Matzak va obliger les SDIS à rationaliser leur organisation et leur fonctionnement, afin de dégager les marges de manoeuvre budgétaires nécessaires au financement de leur mise en conformité avec le droit européen. » P106

« L’assimilation des SPV à des travailleurs entraînerait également d’importantes conséquences financières pour les SDIS. Elle les contraindrait à recruter davantage de SPP ou de SPV, à organisation territoriale et potentiel opérationnel journalier inchangés. En effet, les SPV ayant une activité salariée à temps plein (1 607 heures) ne pourraient plus consacrer que 697 heures par an à leurs activités de SPV, et les SPP sous « double statut », assurant des gardes de plus de 12 heures sur la base maximale autorisée en France de 2 256 heures, ne pourraient plus consacrer que 48 heures à leurs activités de volontaires. » P107

« Se poserait par ailleurs la question du maintien de l’efficacité opérationnelle des SPV (hors « double statut »). Certains SDIS considèrent en effet qu’elle est conditionnée par une activité minimale annuelle. Cependant (…) l’appréciation de ce volume minimal varie fortement d’un SDIS à l’autre. » P107

 « (…) selon la Mission Volontariat, le budget alloué à l’indemnisation des SPV (556 M€) permettrait de disposer d’environ 48 000 sapeurs-pompiers contractuels employés à tiers temps, soit 16 000 employés à plein temps. La DGAFP relève, pour sa part, que 42 % des gardes sont assurées par des sapeurs-pompiers volontaires, pour un équivalent budgétaire de 30 000 ETP.  Cependant, ces différentes estimations, opérées à modèle constant, ne tiennent pas compte des effets pouvant résulter, en termes d’efficience, d’une part, de la mise en place d’une gestion des ressources humaines mutualisée avec les départements et surtout professionnalisée (…) et, d’autre part, des décisions à prendre au terme de la revue des missions que les juridictions financières appellent de leurs voeux (…). L’exercice est néanmoins intéressant parce qu’il confirme ce que représente l’engagement des SPV dans le système de la sécurité civile en France.» P108

 L’urgence d’une revue des missions de la sécurité civile P111

 «  (…) la part du SUAP dans la durée totale des interventions des services départementaux d’incendie et de secours est passée de 57 % en 2012 à 63 % en 2017. (…) Cette évolution n’est pas durablement soutenable.

Le système a atteint ses limites opérationnelles P112

 « Dans son rapport public annuel pour 2004, la Cour avait déjà souligné la nécessité d’améliorer la coordination entre les SDIS et les SAMU en matière de secours d’urgence à personne. » P112

 «(…) la mutualisation physique des plateformes d’appel « 15/18 », mesure pourtant fondamentale, reste encore aujourd’hui minoritaire. P112

 « La Cour constate que le « SUAP », dont relevaient 54 % des 3,4 millions d’interventions réalisées en 1988, en représente 84 % trente ans plus tard. La tendance n’est donc pas nouvelle et devrait se prolonger. » P115

 Sur les constats, les difficultés des financeurs, la hausse de l’activité opérationnelle et le bouleversement important lié à l’application des règles de protection élémentaires aux  sapeurs-pompiers volontaires, nous sommes assez d’accord.

 Quant aux solutions que propose la cour des comptes, nous sommes y bien souvent opposés:

  • nous ne pouvons pas considérer que l’estimation de 30 000 ETP, pour compenser les gardes assurées par les SPV soit une base de travail sérieuse, c’est un épouvantail agité pour effrayer. 
  • la pratique du “double statut” constitue un dévoiement de la loi  mais la CC ne propose que de “mettre un terme aux abus face à l’évidence du volume de vacations” 
  • l’évocation de la prime de feu en ne la considérant que comme une dépense d’un montant important alors que les SPP, depuis 1990 cotisent et surcotisent pour son intégration, (seule prime reconnaissant le caractère dangereux du métier de sapeur-pompier). 
  • égratigner les abus sur l’utilisation des VL sans disposer que l’utilisation même est contraire à la réglementation. Aucun agent des SDIS n’est éligible aux véhicules de fonction 
  • penser que les gardes de 24 heures n’ont d’intérêt réel que dans les centres dont l’activité opérationnelle est soutenue et régulière, quant au contraire pour préserver la santé et la sécurité des SP il est impérieux de diminuer la durée  d’exposition et la pénibilité 
  • blâmer les SIS pour le non-respect de la durée légale de 1607h, quand les SPP travaillent encore avec le régime d’équivalence de temps de travail (24 décomptées 17) plus de 2000 heures payées 1607 et que la réglementation autorise à  prendre en compte 
  • justifier qu’une activité réputée bénévole mais indemnisée mais simplement proposer d’éviter que certains SPV exercent à temps plein, sans faire le détail de ce que pourrait être l’organisation et le fonctionnement des SDIS après MATZAK. 

Ce rapport s’inscrit dans le sillon du service trop cher, agents trop gâtés, et il se trompe en pointant comme vertueux au motif de la faiblesse des coûts des SDIS qui sont par ailleurs des exemples des limites opérationnelles, et à la mise en danger des intervenants en respectant tout juste la seule obligation de moyens. 

Manifestement ce rapport doit imposer une réflexion globale, il pointe l’urgence de la revue des missions de la sécurité civile pour sauver un système qui a atteint ses limites opérationnelles. 

Nous appelons de nos vœux depuis  longtemps des assises nationales de la sécurité civile, conscients de la nécessité d’arbitrages politiques au regard des enjeux Sociétaux.

 

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